Carte blanche à Jeanne Ricoeur
Diplômée des Beaux-arts de Paris, doctorante en Art plastiques à l’Université de Lille et membre du CEAC depuis 2021
« Mon travail photographique s’inscrit dans une circulation de pensées et d’images. La littérature y tient une place essentielle. Je construis un corpus photographique depuis des années qui me permet de décontextualiser les images produites de mes futurs montages. Ce corpus rassemble des photographies N/B et Couleur, argentiques et numériques, mais aussi archives familiales, photogrammes de film, photographies anonymes et photographies de presse, classées par unité de lumière ou par thématique.
Toutes se nourrissent les unes les autres, se combinent, dialoguent et tissent entre elles de nouveaux liens dans ce que j’appelle des « phrasés photographiques ». J’emprunte cette expression à Peter Szendy, citant Walter Murch : « nous clignons des yeux pour phraser ce que nous voyons, sans ce phrasé ponctuant, il n’y aurait pas de regard. Les paupières ponctuant sont déjà un montage dans le regard lui-même, s’il n’y avait pas ce montage, on n’aurait pas la possibilité de regarder, de voir. »
Le phrasé du regard est au coeur de mes montages photographiques et résonne avec certaines oeuvres littéraires. Il permet la discontinuité, l’écart, le hors champ, l’intermittence, le suspens, le retrait, la réserve, le noir : un imaginaire en soi. À la manière d’un montage cinématographique, j’y développe des rythmes en écoutant l’absence, et compose avec les images qui n’existent pas, sans essayer de combler les manques. »